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« Celle qui détestait la Princesse de Clèves »

  • Etienne
  • Feb 1, 2016
  • 3 min read

Carol, de Tood Haynes

Informations générales concernant le film:

Genre : Drame, Romance Durée : 1h58 Sortie : 13 janvier 2016 Acteurs Principaux : Cate Blanchett, Rooney Mara, Kyle Chandler

Réalisateur : Todd Haynes


« New-York, 1953, dans un restaurant chic. Deux femmes boivent un verre en tête à tête : la première, d'une quarantaine d'années, richement habillée, les cheveux d'un blond platine, dégage une élégance sereine ; la seconde, plus jeune et d'un style plus classique a le regard bleu d'un océan agité. Un long silence plane entre les deux femmes, lorsqu'un homme survient. Il propose à la plus jeune de l'accompagner à une soirée chez un ami commun. L'autre en profite pour s'en aller, prétextant un dîner avec des amis...

Mais la plus jeune, dans la voiture qui la conduit à la soirée, se souvient... Elle regarde des enfants courir à travers la vitre embuée et se souvient, oui... »


Ainsi commence Carol, dans un décor très lisse où l'ambiance est pourtant teinte de non-dit et de mélancolie. Les souvenirs de Therese (Rooney Mara), la plus jeune donc, nous ramène alors quelques mois auparavant, lorsque elle était vendeuse dans un magasin de jouets. C'est là qu'elle a rencontré Carol, interprétée par Cate Blanchett, venue acheter un cadeau de Noël pour sa fille.

Le film raconte leur histoire d'amour naissante dans cette Amérique très conservatrice des années 1950, qui rappelle La Fureur de Vivre de Nicholas Ray. Cette fureur de vivre justement, c'est l'énergie qui habite, qui porte ces deux femmes, mues toutes deux par la volonté sourde de jouir de la vie comme elles l'entendent : la première, Carol, est tiraillée entre sa condition de mère mais surtout de femme mariée à un homme riche issu d'une famille très prude, et son désir pour les femmes que l'on ne saurait faire taire ; la seconde, Therese, vit avec un homme depuis plusieurs années déjà qui vient juste de la demander en mariage, mais refuse de s'engager car, on le comprend bien, elle n'a pas d'attirance pour celui qui partage sa vie.


Mais alors pourquoi Carol ? Pourquoi un tel titre ? Parce que Carol – ou Cate Blanchett soyons clair, le rôle a été taillé pour elle –, est le personnage, la femme qui fascine : pas seulement le spectateur, mais aussi Therese. Elle dégage quelque chose, une présence, un charme qui donne l'impression qu'elle rougeoie au milieu de la foule morne et grise. C'est la femme dont le mariage est en train de s'effondrer, pour qui le déni devient invivable au moment où elle rencontre Therese. Pourtant, elle vous sourit imperturbablement, vous pénètre de son regard calme. C'est la femme qui fait tomber son mari lors d'une dispute tant elle est insaisissable...


Et la musique et la mise en scène portent le charisme de l'actrice à l'écran de manière prodigieuse : on se retrouve plonger dans cette Amérique des années 1950, puritaine et fausse dont fait partie le personnage de Carol, mais qui elle a a décidé de se battre, remonte à la surface et tente de sortir de cet océan fade.


Certains voudraient trouver un parallèle avec La vie d'Adèle, mais il n'y en a pas si ce n'est dire que le film parle de la relation amoureuse entre deux femmes ; l'histoire se veut pleinement ancrée dans son contexte historique, et les musiques – j'y reviens, car elles nous transportent – sont là pour le rappeler.

Par ailleurs, les choix de mise en scène témoignent de la volonté de mêler cette authenticité historique à la puissance évocatrice des images. Le recours au flou lors des scènes où l'amour laisse

place à la passion crée des plans qui irradient d'intensité. Aussi la manière dont sont filmés les yeux des actrices, mis en avant tout au long du film comme sur l'affiche elle-même, nous saisit par son ardeur et nous rappelle combien « tout vrai regard est désir » (Alfred de Musset)...


Certes on peut trouver que le jeu des actrices, et notamment celui de Rooney Mara, sonne un peu faux parfois, mais c'est la seule note discordante dans la mélodie de ce film.


Enfin, si vous vous dites que le sujet ne vous intéresse pas plus que ça, personne ne vous en voudra ; mais je vous dirai que le réalisme de la réalisation, qui vous fait voyager dans l'Amérique des années 1950, les questions que posent ce film sur la vie et la manière dont on la vit, dont on se bat pour la vivre, et la majesté de Cate Blanchett – tout aussi ensorcelante qu'en reine des elfes dans Le Seigneur des Anneaux – sont pour moi trois arguments qui font de ce film une œuvre à ne pas manquer.

E. Marty


 
 
 

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